Chronique de février 2020 La satisfaction hallucinatoire des désirs (Une publication de 1899, datée de 1900, partie 2)

Dans son célébrissime ouvrage L’interprétation des rêves, Freud définit le rêve comme le produit d’une satisfaction hallucinatoire d’un désir (ou de plusieurs désirs à la fois).


Un peu comme dans le proverbe « Qui dort dîne », dans son acception moderne du moins, c’est-à-dire : « Si j’ai faim durant mon sommeil, je rêverai que je mange, et, grâce à cette satisfaction hallucinatoire, je n’aurai plus faim ! »¹… ce que Freud appelait un rêve de confort.

Mais au-delà de la satisfaction de ce type de désir « simple et sans voile », massivement à l’œuvre dans le rêve des enfants, ce qui intéresse réellement Freud c’est l’accomplissement hallucinatoire des désirs interdits, refoulés… et, par là même, inconscients².

Profitant de l’affaiblissement transitoire des défenses psychologiques (refoulement en tête) consécutif à la survenue du sommeil, les désirs interdits (par la censure interne) remontent à la surface. Et ce sont les désirs sexuels infantiles qui sont essentiellement visés par Freud³.

Sans l’intervention providentielle des rêves, ces désirs — dévoilés et ragaillardis — conduiraient irrémédiablement l’infortuné dormeur à se réveiller… dans le but de les assouvir !


¹Le fameux proverbe dérive en réalité d’une expression usitée, jadis, dans le secteur de l’hôtellerie, laquelle signifiait : « Qui veut dormir dans une auberge, doit également y prendre son repas » (ou, plus brutalement : « Si tu dors tu manges, si tu ne manges pas tu sors ! »)… c’est de demi-pension dont il était donc, finalement, question ! Le linguiste Alain Rey (rédacteur en chef du Petit Robert) affirme que l’acception moderne nous viendrait de Ménandre, un dramaturge grec du IVe siècle av. J.-C. ayant déclaré que « le sommeil nourrit celui qui n’a pas de quoi manger ».

²Il suit en cela F. W. Hildebrandt (Le rêve et son utilisation pour la vie, 1875) : « Nous pourrions caractériser les représentations « non voulues » des rêves comme étant les représentations « réprimées » pendant le jour ».

³Cette focalisation sur la fantasmatique sexuelle infantile n’apparaît toutefois que dans la seconde édition de la Traumdeutung, celle datant de 1911… l’origine sexuelle des rêves — tout comme celle des manifestations psychopathologiques d’ailleurs — n’ayant été mise en évidence que dans l’intervalle (« Les désirs érotiques infantiles, conservés en un point quelconque par presque tout homme civilisé, sont les forces pulsionnelles les plus nombreuses et les plus puissantes qui concourent à la formation des rêves »).


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